mardi 12 décembre 2017

Attendus: le blind test!

Les attendus nationaux viennent d'être publiés par le ministère. Comment dire…
Justement je vous propose un petit jeu parfaitement objectif pour évaluer la pertinence de ces attendus. Voici 7 attendus à vous de découvrir les mentions de licence auxquelles ils se rapportent. Si les attendus sont pertinents cela devrait être facile. Dans le cas contraire on revoit la copie?

Disposer de compétences méthodologiques et comportementales afin d’être capable de travailler en autonomie et de manière responsable

En licence, l’étudiant est acteur de sa formation et de sa réussite. Il doit donc notamment être capable d’organiser son travail, d’aller chercher les ressources à sa disposition et de rechercher les temps de travail collectifs.

Le privé échappe (provisoirement) à ParcourSup


Mais quelle ingratitude ! Vous qui lisez mon blog vous savez à quel point je fais mon possible pour accompagner les gouvernements successifs sur l’ESR depuis 4 ans et corriger leurs erreurs stratégiques et techniques. J’ai même proposé d’être ministre du SUP pour aider le président ; c’est dire ! En plus je fais ça bénévolement, le week-end ou en soirée au lieu de regarder tranquille un épisode de « Plus belle la vie ». Vous me direz, si on en croit notre président, je ne perds rien à ne pas suivre les émissions du service public à la télévision. Mais enfin tout de même !

dimanche 26 novembre 2017

Pré-requis: crise de l’université ou crise du BAC ?

MAJ 30 nov. : en LLASHS les "attendus" virent à la caricature.

Exemples des pré-requis proposés par la CDUL (conférence des doyens): "bon niveau d'expression de langue française", "bon niveau dans une langue étrangère", "intérêts liés à la mention choisie... (goût pour la littérature)", "curiosité intellectuelle", "notes satisfaisantes dans au moins 2 des 3 disciplines suivantes: français, philosophie, histoire-géographie".

Les "éléments issus du conseil de classe" sont mentionnés ; comme dernier critère d'appréciation.


Vitesse ET précipitation. La réforme de l’accès à la licence avance à marche forcée et on voit venir l’accident industriel doublé d’un crash juridique mémorable. À chaque étape il faut manier l’étoupe et le goudron pour colmater les brèches dans la coque. Et en pleine mer, le résultat n’est pas garanti.

Pendant que le texte arrive à l’Assemblée Nationale, les collègues travaillent sur les « attendus » (ex « pré-requis »). Les premières propositions présentées par Educpros illustrent le défaut structurel de cette réforme. La sélection est une mauvaise réponse à deux réels problèmes de l’université : l’échec des bacs pro et l’insuffisance des moyens humains et financiers. Nous ferons ici trois constats.

samedi 25 novembre 2017

Fin de la compensation en licence : la surprise du chef

C’est le scoop de la réunion sur les pré-requis qui s’est tenue au ministère le 16 novembre dernier : la ministre veut mettre fin à la compensation. Je n’étais pas invité à cette réunion, mais les différents comptes rendus qui circulent et les discussions que j’ai pu avoir avec plusieurs collègues le confirment : les notes en dessous de la moyenne ne pourraient plus être compensées par celles au-dessus de la moyenne. La réforme n’aurait pas lieu immédiatement puisque le projet de loi en discussion porte sur l’accès à la licence. Elle interviendrait juste après, lors de la réforme de la licence qui passe par un simple arrêté et ne nécessite pas le vote d’une loi. Les organisations étudiantes n’ont pas encore été prévenues a dit la ministre ; on comprend pourquoi !


vendredi 3 novembre 2017

Réforme de la licence : pour certains, les impôts aussi vont augmenter !


Je commencerai cette troisième chronique sur la réforme de la licence par des remerciements. Depuis que je tiens ce blog, j'ai pris conscience des deux principales difficultés de l'exercice : le temps et la solitude. Des deux, la solitude est la pire. Personne pour vous relire, vous contredire, compléter votre propos avant qu'il ne soit public (je viens d'en faire l'amère expérience avec la première version de cette chronique...supprimée). Cela m'a fait apprécier les conseils scientifiques et les secrétariats de rédaction des revues académiques qui réagissent et vous assistent avant publication. Seul on ne va pas très loin et c'est la raison pour laquelle je voudrais remercier ces lecteurs qui m'écrivent pour me signaler une erreur, une interrogation, ou même m'alerter sur un aspect du dossier que je n'avais pas envisagé.

mercredi 1 novembre 2017

Nouveaux bacheliers non-boursiers : la double peine

Mise à jour dans le texte 02/11/2017

Pour faire passer la sélection, le gouvernement a eu l'idée de faire deux réformes en une. Le projet de loi relatif à l'orientation et à la réussite étudiante restreint les conditions d'accès dans l'enseignement supérieur, mais dans le même temps il met un terme à la sécurité sociale étudiante. Chacun peut ainsi se féliciter de la réforme, la CPU qui espère négocier une vraie sélection au prix d'une partie de son autonomie pédagogique et la FAGE qui communique sur la fin du régime étudiant de sécurité sociale.

Alors qu'une nouvelle contribution étudiante voit le jour, il y aurait même un gain de pouvoir d'achat pour les étudiants! Le gouvernement s'est fendu d'une infographie, page 40 du dossier de presse, pour montrer que la nouvelle taxe permet aux étudiants de réaliser une économie. Cette infographie est truffée d'erreurs. Dans les exemples, le montant de la nouvelle contribution ne correspond pas aux taux annoncés pour chaque cycle. Mais surtout, comme une collègue vient de me le faire remarquer, elle omet de présenter les conséquences de la réforme pour les primo-entrants les plus nombreux: les bacheliers non boursiers.

mardi 31 octobre 2017

Réforme de la licence : Lénine sors de ce corps !


Mise à jour : quelques remarques complémentaires à la suite des discussions sur les réseaux sociaux et à la fin de la chronique le texte consolidé du projet. N'hésitez pas à signaler d'éventuelles erreurs.

La presse spécialisée ayant diffusé le projet de loi sur la réforme de l’accès au premier cycle de l’enseignement supérieur, une analyse s’impose, même si elle est incomplète. C’est un texte bien curieux, contradictoire, avec quelques cachotteries, un mélange entre les théories post-modernes de Giddens et du « New Labour 90’s » et un centralisme démocratique bureaucratique qui fleure bon la Russie soviétique.

Le projet est sans ambition quand il ravaude le règlement des études universitaires, consacrant les pratiques qui se sont développées ces dernières années en licence comme en master. Le SUP sera sélectif et, pour ne pas émouvoir les syndicats étudiants, il y aura une voie de garage que certains optimistes voudront considérer comme une seconde chance.

Mais par ailleurs, le projet est aussi radical dans sa symbolique, révolutionnaire même, quand il supprime la liberté d’inscription dans le supérieur et, surprise, l’autonomie d’orientation des établissements.

mercredi 11 octobre 2017

La compétence inversée : pensée complexe

On connaissait la classe inversée, on découvre la compétence inversée. Une nouvelle DGESIP a été nommée en conseil des ministres. Il s’agit de l’actuelle directrice (administratrice générale) de l’INP Grenoble. Le choix laisse perplexe. En principe, quand on procède à un recrutement, on cherche l’adéquation entre le profil du poste et le profil du candidat ou de la candidate. Ici, il semble que ce soit le contraire et que le gouvernement ait cherché le ou la candidat (e) la plus éloignée du profil du poste.

jeudi 31 août 2017

Licence : Faire du neuf avec du vieux

C’est une rentrée en fanfare pour le SUP. Pendant l’été c’était la fête de la LRU pour ses 10 ans avec une dégradation du rang des universités françaises dans le top 100 du classement de Shanghai. Démonstration in vivo du succès de l’autonomie ! Pas grave, sa petite sœur, qui devrait être imposée par ordonnance, a passé des vacances tranquilles à l’ombre du Conseil d’État pendant que ministres, conseillers et courtisans faisaient des vocalises avec les autoproclamées universités de recherche intensive de rang mondial à vocation internationale… Après avoir dilapidé 5,4 milliards d’euros sur le plateau de Saclay, l’objectif est maintenant de réussir à faire au moins trois fois pire en ruinant pour cela le reste du SUP, les étudiants et leurs familles.

Et puis il y a eu le feuilleton de la sélection. Alors le président Macron a prédit la fin du vieux monde et « une révolution de l’éducation dès cette rentrée ». Dans Le Point. Immédiatement notre nouvelle ministre faisait grand tapage pour annoncer la constitution d’un groupe de travail sur la licence et la composition de ce groupe était rendue publique. Et là, surprise. Le président Macron affirmait dans son interview ne rien avoir à faire avec la courtisanerie et vouloir une révolution ; il n’a pas du relire la liste. On nous annonçait une révolution et on se retrouve avec le magasin d’antiquités de la LRU.

vendredi 4 août 2017

Compatibilité Licence & Master : la Loi sans l’Esprit



Et soudain au cœur de l’été le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation est sorti de sa torpeur. Au JO du jour est publié un arrêté « fixant la liste des compatibilités des mentions du diplôme national de licence avec les mentions du diplôme national de master ». Rien que ça ! A voir les premières réactions sur les réseaux sociaux, les présidents étaient peut-être informés, mais certainement pas les équipes pédagogiques.

Après le coup des APL, on devrait interdire aux ministères de sortir des textes pendant l’été. Montesquieu vantait l’Esprit des Lois, avec la DGESIP c’est la Loi sans l’Esprit. Dès la première lecture les incohérences sautent aux yeux. Je découvre que le master Intervention et Développement Social dans lequel j’enseigne en AES… n’est pas compatible avec la licence AES. Chouette, les cours commencent dans 4 semaines ! Ça fait pourtant plus de 20 ans que c’est une « filière » puis un « parcours » de l’AES avant de devenir une "mention"… En revanche on pourra s'orienter vers ce master avec une licence Sciences sanitaires et sociales, licence qui ne permet plus de poursuivre en master de géographie « Santé et territoire » par contre. Sauf que pour l’instant la licence sciences sanitaires et sociales est associée au master de géographie dans mon université. Si l’arrêté n’est pas corrigé, ce sont 3 UFR dont il faut redéfinir les périmètres avant la rentrée (avec des votes statutaires des conseils de composantes et des conseils centraux).

mardi 18 juillet 2017

Coûts cachés des appels à projets : Le pire est toujours certain

La prochaine fois que je présenterai ma candidature comme ministre je le saurai : il faut parler de l’ANR. Près de 18.000 lecteurs en 48h, des commentaires tranchés, c’est un intérêt que mon blog n’a jamais connu… et n’avais pas pour ambition de connaître. Certes l’ANR est un sujet important, mais entre les LRU, la sélection, la redistribution des rôles entre public et privé, le budget ou les évolutions internationales du SUP, j’ai la prétention d’avoir soulevé des questions plus essentielles depuis 4 ans sans susciter le même intérêt.

Nouvelle surprise le 18 juillet : le ministère annonce la démission du directeur de l’ANR. Plus curieux encore, ce dernier se voit confier une mission sur l’évaluation des différents modes de financement public de la recherche !

Hasard du calendrier, cause ou effet ? Certains sur twitter ont cru voir un lien entre la chronique et cet événement. Je penche plutôt pour un cas de métempsychose avec la nouvelle ministre de l’enseignement supérieur. L’âme de Frédérique Vidal est passée dans mon corps ; ou l’inverse. Imaginez si c’était celle de Thierry Coulhon ! Seulement la métempsychose ça ne fonctionne pas toujours très bien, alors le résultat n’est pas vraiment conforme aux attentes.

samedi 15 juillet 2017

(In)efficience et coûts cachés du néo-management : l’exemple de l’ANR

Le financement sur projets est le symbole par excellence du New Public Management et des théories libérales. Foin des dotations récurrentes, les services publics doivent mériter leurs crédits et se battre pour décrocher les moyens de remplir leurs missions. Pas de projet, pas de recherche !

Le SUP est un terrain de jeu rêvé pour ces idéologues, mais ils se gardent bien d’évaluer l’efficience du dispositif qu’ils ont créé. La publication des résultats détaillés de l’appel à projets ANR-AAP générique par News Tank, l'agence d’information spécialisée dans l’éducation, est l’occasion de faire une estimation de ces coûts cachés que les libéraux omettent soigneusement de calculer. Et là surprise! Le financement par projets est ruineux. Certes on s’en doutait, mais quand on fait le calcul, même de façon très sommaire, l’ampleur des coûts impressionne : l’appel à projets coûte plus cher que les sommes distribuées !

Dans la première phase de l’AAP générique 2017 les universités et les labos de recherche ont dépensé 91,55% du budget de l’appel à projets pour candidater ! En clair l’État a obligé ses opérateurs à dépenser 357,2M€ de crédits publics pour obtenir 390,2M€ de crédits publics !

Quand on ajoute les coûts de fonctionnement de l’agence, ceux des multiples conseillers, cabinets d’audit et autres organismes qui prospèrent sur le fumier du libéralisme, pour 1€ de crédits de recherche ANR, l’État et ses opérateurs auront dépensé plus de 1€ de crédits publics. Et encore, je ne prends ici que l’exemple de l’ANR. Si on fait le calcul sur le Commissariat Général aux Investissements d’Avenir, les PIA et les IDEX de l’Institut Montaigne et de MM Coulhon, Schweitzer, Korolitsky, Fuchs & consorts , les ratios sont explosés. Les libéraux font payer leur idéologie par le contribuable français.

vendredi 30 juin 2017

Les Business Schools, Libé, Macron et l'Immaculée Conception

Il y a une semaine, Libération publiait une tribune délirante de Patrick Fauconnier, fondateur du magazine économique Challenges, destinée à promouvoir son nouveau livre « Universités. Innover ou sombrer ».

Le livre est publié – à compte d’auteur ? - aux éditions Fauves, une des marques appartenant à Xavier Pryen « l’éditeur qui ne paie pas ses auteurs » comme l’écrivait Le Monde, également propriétaire des éditions L’Harmattan et de nombreuses autres entreprises comme le Lucernaire forum ou les aires de jeux pour enfants « Kidzy » à Wambrechies, Hénin-Beaumont et Conflans Sainte honorine. Inutile de l’acheter, donc.

On retrouve avec un trait plus grossier les lieux communs et mensonges habituels sur l’université destinés à vendre la dérégulation de l’enseignement supérieur. La technique de la propagande libérale est bien rodée : pseudo-experts relayés par la presse pour installer un « état d’esprit » auquel le gouvernement « répond » par un projet de loi (ou d’ordonnance).

Sauf que là, le pseudo-expert y allait un peu fort déclarant : « Notre université est à la traîne des grandes universités étrangères, ce qui explique une bonne part de notre record de chômage des jeunes ». Le chômage, la faute au mauvais ranking des universités ? Rien que ça ! On rappellera juste ici qu’avec la même méthode que celle de ces fameux classements, Aghion, un des conseillers du programme sur le SUP d’Emmanuel Macron, serait néo-prix Nobel d’économie depuis 2014…

mardi 6 juin 2017

Êtes-vous dans une université d'excellence à rayonnement international ?

C’est parti pour l’expérimentation. Comme des affamés ils se sont précipités pour réformer sans réformer et finalement hiérarchiser les universités. Reconnaissons-le, c’est clair et assumé. Sur Twitter Thierry Coulhon, rédacteur du programme En Marche sur le SUP et nouveau conseiller SUP du président de la République a déclaré sans réserve : « Le niveau d’ensemble doit monter, mais on doit accepter de constater ou de faire des différences » entre les universités. Il y aura donc plusieurs classes d’universités et la première classe sera constituée par les « universités d’excellence à rayonnement international ».

dimanche 21 mai 2017

Après l'autonomie de Sarkozy, l'expérimentation de Macron

Le casting était presque parfait. Une présidente d’université ministre de plein exercice à l’ESR qui récupère l’innovation et un DG de business school à l’Éducation. De la dentelle !

Puis les premières déclarations sont arrivées. LA ministre est « pragmatique » et regardera « avec bienveillance les expérimentations » selon Educpros. Pour LE ministre « L'expérimentation aura un rôle décisif » et il lancera « des concertations locales et des expérimentations » dans Le Monde. Foin des réformes top down, de la LRU, de la loi Fioraso, vive le bottom up, le pragmatisme et l’expérimentation ! 

Qui est contre le pragmatisme hein ? C’est comme l’autonomie le pragmatisme, c’est bien le pragmatisme, c’est le contraire du dogmatisme ! Et l’expérimentation ? Quoi de plus modeste et de plus respectueux que l’expérimentation ? C’est facultatif l’expérimentation, ça ne vous engage à rien l’expérimentation, c’est comme ce vieux tube du groupe Chagrin d’amour l’expérimentation « chacun fait c’qui lui plaît » ! C’est la LIBERTÉ !

vendredi 12 mai 2017

#MacronLeaks et ESR, chronique d’un rendez-vous manqué




J’ai donc lu les #Macronleaks, du moins en partie, sur l’enseignement supérieur et la recherche. Avec toute la relativité liée à l'origine et à la nature très parcellaire des informations révélées, cette lecture suscite plusieurs remarques. Sur les réserves que l'on peut avoir à propos de documents piratés, peut-être partiellement faux, et sur leur instrumentalisation par la fachosphère, je vous renvoie à l'article de Libé. Sur le fond, on n'y apprend rien et tout. Rien, parce que, dans leurs grandes lignes, nous connaissons déjà par cœur les méthodes, les acteurs et le projet, les mêmes depuis des années. Je vous renvoie là aussi aux chroniques publiées sur ce blog ou sur ceux d’autres collègues, Groupe JP Vernant, Histoire d’universités ou RogueESR pour comprendre l’échec prévisible de cette réforme. Tout, parce que la politique s’y expose sans fard, dépouillée de la compol, de la novlangue et du « storytelling». Elle y acquiert une franchise, une sincérité qui peut scandaliser ou susciter la réflexion.


dimanche 7 mai 2017

Si j’étais ministre de l’ESR : candidature spontanée


Monsieur le président de la République française, camarade, cher Manu,


Tu permets que je t’appelle camarade et que je te tutoie ? Aucune familiarité, c’est juste une tradition chez les gens de gauche, comme le « cher ami » et le voussoiement chez les gens de droite.

Alors Manu, je voulais d’abord te féliciter pour ton élection. En plus comme j’ai été obligé de voter pour toi au second tour, c’est un peu ma victoire à moi aussi. J’ai été soulagé que tu gagnes camarade. Soulagé, mais pas réjoui. Je peux te le dire maintenant, il est pas fantastique ton programme. Sur l’enseignement supérieur et la recherche, une partie de ton "deuxième chantier", c’est même un cauchemar. Toi qui veux réformer la France et la moderniser, ils t’ont refourgué une réforme d’occasion qui a déjà servi à 3 ou 4 présidents et une dizaine de ministres. Ils ont passé un coup de polish sur la carrosserie, mais le moteur est mort. Je ne te donne pas 6 mois avant qu’elle rende l’âme. 

dimanche 9 avril 2017

Le mauvais combat pour "l’Université Georges Soros"

Depuis quelques jours les lobbies se mobilisent pour défendre la Central European University de Budapest, plus connue sous le surnom « d’Université Georges Soros », dont l’avenir serait compromis par une nouvelle loi proposée par Victor Orban. La très libérale et très clientéliste Association des Universités Européennes qui s’agite toujours pour plus d’autonomie, de dérégulation et de business dans le SUP, la CPU et le fantomatique Harlem Désir y sont allés de leurs communiqués, rejoignant celui du département d’État Américain. C’est un bien mauvais et bien dangereux combat.

Victor Orban est un odieux personnage, nationaliste xénophobe, aux antipodes des valeurs que je défends. Pour autant, la Central European University est-elle ce défenseur de la démocratie et des valeurs universitaires qu'on nous présente ? Non.

jeudi 2 mars 2017

Macron, Aghion la CPU et l'État Stratège

Le programme d'Emmanuel Macron sur le SUP est sorti. Sans surprise, il s'agit de dupliquer en France un prétendu "modèle américain" dont l'échec, faut-il le rappeler, a été au coeur des discours de Mme Clinton, de Bernie Sanders ou du président Obama pendant la campagne présidentielle. Sur twitter je l'ai qualifié de stupide et mauvais. Proposer un système qui échoue c'est un mauvais programme. Proposer un système dont on mesure aujourd'hui les échecs c'est stupide. Voici, plus en détail, les raisons de ce jugement.

Un universalisme trompeur

Le projet d'Emmanuel Macron reprend les arguments qui avaient été développés au moment de la présentation de la LRU par Valérie Pécresse. Pas étonnant, les conseillers sont les mêmes, Aghion notamment.

Le premier de ces arguments est d'implanter en France le "modèle international" de l'enseignement supérieur et de la recherche c'est à dire... le modèle des universités privées américaines. Premier mensonge: ce modèle n'est pas universel loin s'en faut. Il ne concerne qu'un petit nombre de pays anglo-saxons et dans ces pays un petit nombre d'établissements qui accueillent une infime minorité des étudiants et des chercheurs. Aux États-Unis il s'agit pour l'essentiel de 6 des 8 universités privées de la IVY League.

vendredi 10 février 2017

Sélection en master et étudiants internationaux : l'arbre et la forêt




L’espace de 24h l’université Paris-Nanterre a supprimé l’accès en master aux étudiants internationaux. Nanterre la Rouge, Nanterre du « Mouvement du 22 mars », l’université ouverte, mon Alma Mater, fermée aux étudiants internationaux ???!!! Il n’y avait qu’Elle pour pouvoir mettre un tel pavé dans la mare sans être suspectée de xénophobie. Car ce sont des problèmes techniques qui expliquent cette décision, des problèmes qui dépassent l’université de Nanterre et la question des étudiants internationaux.

En revenant sur sa décision, l’université s’est expliquée. Elle a mis en avant des contraintes administratives conjoncturelles, mais aussi des raisons plus structurelles comme la sélection en master. Dans Le Monde, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche exprime son « incompréhension » et prétend que « rien ne peut l'expliquer dans la réforme de la sélection en master ». Et pourtant si ! Je l’avais d’ailleurs indiqué dans ma précédente chronique sur les étudiants internationaux et je ne peux qu’inviter le ministère à me lire pour mieux comprendre ce qui se joue dans le SUP... 

Le nouvel article L.612-6 al. 2 du code de l’éducation autorise les universités à organiser une sélection par concours ou dossier en M1. En contrepartie de cette sélection, l’article L.612-6-1 rend automatique, sous condition de réussite, la poursuite en M2. Les universités définissent donc leurs capacités d’accueil en M1 en fonction de leurs capacités d’encadrement en M2.

mercredi 8 février 2017

APB : l'effet Trump et le Manège Enchanté

Aux USA le président tweete au petit déjeuner pour diriger l’Amérique ou se plaindre du traitement réservé à sa fille dans un grand magasin. En France c’est au goûter que la Directrice de l’enseignement supérieur envoie des emails pour modifier APB.

Certes, le Conseil d’État a admis le 5 mai 2014 qu’un ministre puisse prendre une décision par courrier électronique et que les justiciables puissent demander l’annulation de cette décision. Mais le procédé est bien cavalier et bien discret quand il s’agit de l’orientation des étudiants de première année de licence.

Il faut dire que depuis quelques temps, au ministère de l’enseignement supérieur quand ce n’est pas "les pieds nickelés" c’est "Le Manège Enchanté" avec Flappy, Zébulon et Azalée envoutés par Zabadie*.

Sur le tirage au sort nous en étions à 4 épisodes en 15 jours :

16/01/2017 annonce d’un texte pour « sécuriser juridiquement le tirage au sort »
17/01/2017 report sine die du texte « pour ouvrir une réflexion sur ce sujet sensible ».
19/01/2017 renforcement du tirage au sort qui intègre désormais les étudiants qui se réorientent en changeant d’université
6/02/2017 Thierry Mandon déclare qu’il a la volonté de faire disparaître le tirage au sort, mais…
6/02/2017 … le même jour Simone Bonnafous envoie donc un mail aux présidents d’universités pour leur dire de faire ce qu’ils veulent pour les réorientations internes ouvrant la possibilité d’un nouveau renforcement du tirage au sort ! 

lundi 23 janvier 2017

APB : La surprise du chef !

C’est bien connu, quand on a les pieds dedans, plus on bouge, plus on s’enfonce. C’est un peu ce qui arrive au ministère de l’Éducation Nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche et à son secrétaire d’État avec APB (Admission Post Bac).

Sous la double pression de la hausse des effectifs étudiants et de la baisse des crédits, avec le corollaire des « gels de postes » recommandés par l’IGAENR, les universités ont été contraintes d’instaurer des capacités d’accueil pour l’entrée en Licence dans les filières «en tension ». Lorsque ces capacités sont atteintes, les étudiants admis à s’inscrire sont tirés au sort. Ce système absurde, dénoncé par tous, organise une sélection de fait dont la légalité a été critiquée par le Tribunal administratif de Bordeaux le 16 septembre dernier.

Adepte de la rustine, le ministère annonçait lundi dernier la présentation pour avis au CNESER d’un projet d’arrêté pour « sécuriser » le tirage au sort. Devant l’hostilité de tous les acteurs, le texte était finalement retiré et son examen reporté sine die « pour ouvrir une réflexion sur ce sujet sensible » à en croire les propos rapportés par Le Monde.

Il y avait donc de quoi être surpris vendredi à l’ouverture d’APB en découvrant que le paramétrage avait été modifié. Un courrier daté du 19 janvier et signé de Simone Bonnafous, DGESIP, ainsi qu’une note du 13 janvier relative à « l’application de l’article L.612-3 du code de l’éducation » détaillent ces changements. Curieusement la note vise «l’arrêté pris en application des dispositions du 2ème alinéa de l’article L.612-3 du code de l’éducation », c’est-à-dire le fameux projet reporté sine die « pour ouvrir une réflexion sur ce sujet sensible »… 

mercredi 18 janvier 2017

Sélection en master: le privé pas fair-play

 je vous le dis : celui qui entre dans l’enclos des brebis sans passer par la porte,
mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et un bandit.

Le berger mercenaire n’est pas le pasteur, les brebis ne sont pas à lui 
Évangile selon St Jean 10 : 01,12


Najat Vallaud Belkacem et Thierry Mandon devraient faire relire aux instances de l'enseignement supérieur catholique la parabole du bon berger dans l'Évangile selon Saint Jean.

La réforme de la sélection en master est la Grande Oeuvre de ce quinquennat raté pour l'enseignement supérieur et la recherche. Mais depuis plusieurs années, il y a un côté pieds nickelés dans les cabinets ministériels. Même animés des meilleures intentions du monde, ils ne sont pas très doués et les bergers mercenaires en profitent.

dimanche 15 janvier 2017

L’attractivité internationale du SUP en France : Le vrai et le faux

La publication des chiffres actualisés de la mobilité internationale de l’UNESCO par Campus France est une aubaine pour les  déclinistes. Il y aurait une « rupture » depuis 2012, une baisse des inscriptions en doctorat et une perte d’attractivité du SUP français, en particulier des universités. Le communiqué de Campus France évoque une situation « préoccupante ». Les propos de sa directrice sont même anxiogènes. Dans Le Monde ou Le Figaro, elle affirme que « les universités marquent le pas », que « l'on constate une baisse des inscriptions de doctorants internationaux » et que le « soft power français est concurrencé par des pays dont on ne partage pas  forcément les valeurs » (Arabie Saoudite, Turquie, Chine, Russie… suivez mon regard).

Dans Challenges, Bernard Ramanantsoa, ancien DG d’HEC, en profite pour jouer les Cassandres – ou plus modestement les Jacques Attali – en reprenant les propositions de son livre et en brodant sur le rapport de France Stratégie publié à l’automne dernier sur un sujet pourtant assez différent (les formations délocalisées).

Pourquoi sonner le tocsin ? D’abord, nous dit-on, la France perd la 3ème place au classement mondial de l’UNESCO. Ensuite, il y a une « baisse de la hausse » de la mobilité entrante. Le SUP français accueille toujours plus d’étudiants en mobilité internationale, mais la croissance est plus faible qu’au niveau mondial. Enfin les universités sont les principales responsables de cette perte d’attractivité et plombent les statistiques avec un taux de croissance très faible comparé à celui des écoles. Ces affirmations sont pourtant largement contredites par les données que présente Campus France.

Changement de méthode

Première inquiétude, la France aurait perdu la 3ème place mondiale. Diantre ! D’abord tout dépend de la source, l’UNESCO ou l’OCDE, dont les périmètres étaient différents. Dans les statistiques de l’OCDE la France était à la 4ème place derrière les USA, le Royaume-Uni et l’Australie en 2001 et… toujours en 2016. Rien n’a changé en 15 ans. Dans celles de l’UNESCO la France était à la 4ème place derrière les 3 mêmes pays mais était passée devant l’Australie (de peu) il y a 2 ans.