Aux
USA le président tweete au petit déjeuner pour diriger l’Amérique ou se
plaindre du traitement réservé à sa fille dans un grand magasin. En France
c’est au goûter que la Directrice de l’enseignement supérieur envoie des emails
pour modifier APB.
Certes,
le Conseil d’État a admis le 5 mai 2014 qu’un ministre puisse prendre une décision
par courrier électronique et que les justiciables puissent demander
l’annulation de cette décision. Mais le procédé est bien cavalier et bien
discret quand il s’agit de l’orientation des étudiants de première année de
licence.
Il
faut dire que depuis quelques temps, au ministère de l’enseignement supérieur
quand ce n’est pas "les pieds nickelés" c’est "Le Manège Enchanté" avec Flappy, Zébulon
et Azalée envoutés par Zabadie*.
Sur
le tirage au sort nous en étions à 4 épisodes en 15 jours :
16/01/2017
annonce d’un texte pour « sécuriser juridiquement le tirage au sort »
17/01/2017
report sine die du texte « pour
ouvrir une réflexion sur ce sujet sensible ».
19/01/2017
renforcement du tirage au sort qui intègre désormais les étudiants qui se
réorientent en changeant d’université
6/02/2017
Thierry Mandon déclare qu’il a la volonté de faire disparaître le tirage au
sort, mais…
6/02/2017
… le même jour Simone Bonnafous envoie donc un mail aux présidents d’universités
pour leur dire de faire ce qu’ils veulent pour les réorientations internes ouvrant
la possibilité d’un nouveau renforcement du tirage au sort !
Les
présidents ont le choix entre 3 solutions. Comme auparavant, ils peuvent gérer
en interne leurs étudiants qui se réorientent entre les différentes UFR. Dans
cette hypothèse, rien ne change par rapport aux années précédentes et ces
étudiants viennent en plus des capacités d’accueil définies par l’université
pour les primo-entrants.
Ils
peuvent aussi, première nouveauté du email de la Directrice, obliger tous leurs étudiants en
réorientation à passer par APB. Je m’attendais à ce que ce problème soit
soulevé car les méga-universités fusionnées étaient les « victimes
collatérales » de la solution proposée par le ministère le 19 janvier.
Dans
ces méga-universités, les réorientations internes sont nécessairement plus
nombreuses puisque tous les champs disciplinaires, ou presque, sont couverts. A
l’échelle d’une région, nos universités
d-excellence-de-recherche-à-visibilité-mondiale-dans-la-course-aux-IDEX
allaient devoir gérer toutes les réorientations hors capacités d’accueil quand
les universités plus modestes pouvaient utiliser APB pour gérer leurs flux
d’entrée en L1. Le Lobbying a payé, elles pourront décider de recourir à APB
pour toutes les inscriptions ou réinscriptions en 1ère année ce qui
une fois encore augmente le risque de tirage au sort.
Comme si tout cela ne suffisait pas, Simone Bonnafous donne même aux présidents la possibilité de choisir la méthode selon la mention de licence : APB ou pas APB ! Une même université pourra donc demander à ses étudiants de repasser par APB s’ils veulent, par exemple, se réorienter en licence de Droit ou de Psychologie et traiter la question directement en interne s’ils veulent se réorienter vers une licence Électronique, énergie électrique, automatique.
Peut-on
un instant se mettre à la place des étudiants ? Est-ce ainsi que l’on
prétend aider les étudiants les plus fragiles qui ont déjà connu un premier
échec à l’université ? Va-t-on expliquer aux lycéens qui préparent le Bac
que pour la filière qu’ils ont choisi dans APB ils seront en concurrence avec
leurs camarades des années précédentes ?
Et
peut-on un instant se mettre à la place des universités ? Inutile de dire
que toute cette procédure déjà juridiquement périlleuse ne tient pas debout.
Les recours sont perdus d’avance. Les universités vont donc inscrire les
étudiants qui contestent et laisseront les autres à leur destin. Mais qu’à cela
ne tienne pour le ministère : les référés n’arriveront qu’en septembre,
après moi le Déluge !
Quant
aux principes ? Et bien sous prétexte d’égalité Najat Vallaud Belkacem et
Thierry Mandon ont inventé la pire sélection qui soit à l’université : la
sélection par les dés et les prétoires. Ce quinquennat ce n’est plus la fosse des Mariannes, c’est la Vème dimension.
*Toute
ressemblance avec des personnages existant ou ayant existé serait purement
fortuite bien entendu.
Grand merci, Yann, pour ce suivi perspicace, au jour le jour. Le pire n'est jamais sûr, mais il est de plus en plus certain.
RépondreSupprimer