Mise à jour 15 décembre 2016 : Le gouvernement retire l'amendement 142 et en présente un autre (n°185) limité à la prolongation à 10 ans de la période transitoire. Il est adopté malgré les réticences du rapporteur pour qui l'université de Saclay "C'est la bataille de Reichshoffen"...
Mise à jour 21h30 le 13 décembre 2016 : La CPU a publié un communiqué pour dénoncer la méthode et rappeler le risque constitutionnel des cavaliers législatifs.
Le séisme a été annoncé sur l'AEF par Sarah Piovezan puis en fin d'après-midi sur twitter. D'abord Jean-Luc Vayssière, l'ancien président de l'UVSQ, puis le SNESUP et le groupe Jean-Pierre Vernant : le gouvernement allait modifier le statut des COMUES par amendement à la loi sur le Grand Paris.
Mise à jour 21h30 le 13 décembre 2016 : La CPU a publié un communiqué pour dénoncer la méthode et rappeler le risque constitutionnel des cavaliers législatifs.
Le séisme a été annoncé sur l'AEF par Sarah Piovezan puis en fin d'après-midi sur twitter. D'abord Jean-Luc Vayssière, l'ancien président de l'UVSQ, puis le SNESUP et le groupe Jean-Pierre Vernant : le gouvernement allait modifier le statut des COMUES par amendement à la loi sur le Grand Paris.
Dans le SUP nous nous sommes habitués aux cavaliers législatifs que le Conseil constitutionnel apprécie si peu habituellement. Le gouvernement a bien réformé les COMUEs et réparé les erreurs laissées par M. Feltesse dans la LRU2 de Mme Fioraso par amendement à la loi relative à l'agriculture... Mais là!
La LRU 3 par amendement
L'amendement n°142 qui aurait été inspiré par Jean-Richard Cytermann, un de ces lobbyistes qui sévissent depuis près de 30 ans de directions en cabinets (auprès d'Edith Cresson ou de Claude Allègre), ne concerne pas seulement les COMUES ; en réalité c'est la LRU 3 que Najat Vallaud Belkacem et ses amis font passer par amendement!
Que prévoit le texte? D'abord la prolongation à 10 ans du statut dérogatoire dont bénéficient certains EPSCP. Ensuite, et surtout, la possibilité pour tous les établissements publics d'enseignement supérieur appartenant à des COMUES ou des associations de fusionner. En clair c'est la fusion des universités, écoles d'ingénieurs, de sciences politiques ou des beaux-arts qui est rendue possible.
En soit ce n'est pas une mauvaise idée. Cela fait longtemps que je souligne à quel point les fusions d'universités n'ont pas de sens. Le problème français de l'enseignement supérieur est l'éclatement des forces scientifiques entre les universités, les écoles et les organismes de recherche et non l'existence de plusieurs universités aux domaines différents. Mais outre la question de forme d'un cavalier législatif déposé en douce et le fait que les organismes de recherche restent en dehors de ce nouvel établissement, le problème ici est le dispositif proposé.
Un champ de carottes
Pour que cette possibilité de fusion soit attractive il fallait une carotte ou plutôt un champ de carottes. Alors le gouvernement ne lésine pas: pour ceux qui voudront fusionner ce sera sur mesure! D'abord chaque établissement pourra garder sa personnalité morale pendant 5 ans renouvelables ; c'est la filialisation des écoles et universités dans des méga-universités à l'américaine.
Ensuite ces nouvelles "universités" issues des COMUES pourront s'organiser comme bon leur semble: CA, CAC, services communs, modalité des élections au CA, personnalités extérieures... Dans son ardeur réformatrice le gouvernement autorise même ces futures universités à déroger à l'article L711-8 du code de l'éducation qui prévoit... la présence du recteur dans les conseils et fait obligation aux universités de transmettre au recteur, chancelier des universités, copie des délibérations et décisions ayant un caractère règlementaire!
Même les règles relatives aux sanctions disciplinaires des étudiants ou des enseignants-chercheurs pourront faire l'objet de dérogations négociées dans le cadre du décret créant chacune de ces nouvelles "universités régionales".
Plus de CA, plus de recteur, plus de comptes à rendre à l'État, plus d'enseignants-chercheurs, plus de cadre disciplinaire... mais toujours pas d'argent et un doctorat partagé avec toutes les filiales de l'université régionale.
Et puis il y a les victimes collatérales: les établissements privés d'enseignement supérieur, au premier rang desquels les écoles de commerce. Beaucoup ont fait le choix de se rapprocher des universités dans les COMUES. Elles deviendront les appendices incongrus sinon inutiles de cette nouvelle catégorie de méga EPSCP (car l'article L711-2 est également modifié pour permettre la création de ces universités régionales).
On se demande ce que cherche le gouvernement à 5 mois de l'élection présidentielle: à faire une grosse plaisanterie? à utiliser la technique habituelle du ballon sonde chère à François Hollande pour faire passer une version allégée de la réforme après débat au Parlement en prétendant avoir trouvé un compromis? à faire plaisir aux amis avant de partir? à tester le seuil de tolérance des universitaires? Après tout, c'est vrai que le président de la République n'a plus à convaincre les électeurs. 5 mois ça va être long, très long ; trop long.
Liste des dérogations possibles et texte consolidé de l'amendement 142 :
Texte consolidé de l'amendement
Liste des dérogations possibles et texte consolidé de l'amendement 142 :
Les dispositions auxquelles il sera possible de déroger :
L. 711‑1 Principes généraux sur les universités, valeurs, missions évaluation
L. 711‑4 Modalités statut dérogatoire des universités
L. 711‑5 Modalités de transformation des EPA en EPSCP (écoles d’ingénieurs, IEP, IAE, Écoles d’Art comme Louis Lumière, CNED, établissement de Mayotte)
L. 711‑7 vote des statuts des établissements à la majorité absolue des membres en exercice
L. 711‑8, recteur siégeant de droit au CA et obligation de transmettre les décisions réglementaires au recteur
L. 714‑2 création et organisation des services communs inter-établissements
L. 719‑1 L719-2 modalités d’élection aux conseils centraux des universités, constitution des listes électorales, droit à une représentation propre des EC, représentation des professeurs, élus étudiants
L. 719‑3 personnalités extérieures
L719-4 régime financier des RCE
L719-5 vote du budget en équilibre réel, approbation du budget des unités, écoles et instituts, approbation nécessaire des prises d’emprunt et participation à des filiales
L. 719‑7 à L. 719‑9 contrôle financier des universités et pouvoirs du recteur, administration provisoire, contrôle de l’IGAENR, missions de l’agent comptable
L. 712‑6‑1 et L. 712‑6‑2 possibilité de transférer au conseil académique nouveau tout ou partie des compétences de la commission Formation et Vie Universitaire et le pouvoir disciplinaire à l’égard des enseignants-chercheurs, enseignants et étudiants
Ou
D’organiser autrement et en toute liberté les procédures disciplinaires contre les enseignants-chercheurs, enseignants et étudiants (en les confiant éventuellement directement au président)Texte consolidé de l'amendement
Article L711-2
Le présent titre fixe les
principes applicables à l'organisation et au fonctionnement de chacun des types
d'établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel,
qui sont :
1° Les universités
auxquelles sont assimilés les instituts nationaux polytechniques ;
2° Les écoles et instituts
extérieurs aux universités ;
3° Les écoles normales
supérieures, les écoles françaises à l'étranger et les grands établissements ;
4° Les communautés
d'universités et établissements.
5° Les
établissements publics créés en application de l’article L. 718‑6‑1
La liste et la classification des établissements
publics à caractère scientifique, culturel et professionnel sont établies par
décret.
Article L711-4
I.-Les établissements publics à caractère
scientifique, culturel et professionnel sont créés par décret après avis du
Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche.
II.-Les décrets portant création d'établissements
publics à caractère scientifique, culturel et professionnel peuvent déroger,
pour une durée de cinq dix ans, aux
dispositions des articles L. 712-1 à L. 712-6-1, L. 712-7, L. 713-1, L. 714-1,
L. 715-1 à L. 715-3, L. 719-1 à L. 719-3.
Les dérogations ont pour seul objet d'expérimenter
dans les nouveaux établissements des modes d'organisation et d'administration
différents de ceux prévus par les articles susmentionnés. Elles assurent
l'indépendance des professeurs et des autres enseignants-chercheurs par la
représentation propre et authentique de chacun de ces deux ensembles et par
l'importance relative de cette représentation au sein de l'organe délibérant de
l'établissement. Elles assurent également la représentation propre et
authentique des autres personnels et des usagers. Elles ne peuvent porter atteinte
au principe de l'élection des représentants de ces différentes catégories au
sein de l'organe délibérant.
Les expérimentations prévues à l'alinéa précédent
font l'objet d'une évaluation par le Haut Conseil de l'évaluation de la
recherche et de l'enseignement supérieur mentionné à l'article L. 114-3-1 du
code de la recherche. Le Haut Conseil établit, pour chaque établissement, un
rapport qu'il adresse au Parlement et au ministre chargé de l'enseignement
supérieur au plus tard six mois avant la fin de l'expérimentation.
Dans le cas où un établissement entend mettre fin à
l'expérimentation avant l'expiration du délai de cinq dix ans susmentionné, l'autorité exécutive de
l'établissement demande au ministre chargé de l'enseignement supérieur de faire
procéder à l'évaluation par le Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et
de l'enseignement supérieur mentionné à l'article L. 114-3-1 du code de la
recherche ; ce dernier adresse son rapport au ministre et à l'autorité
exécutive de l'établissement dans un délai de six mois à compter de la date de
la demande de l'autorité exécutive ; il émet notamment un avis sur
l'opportunité de la poursuite de l'expérimentation ; au vu de cet avis, il
appartient à l'établissement de prendre la décision de poursuivre l'expérimentation
jusqu'au terme du délai de cinq dix ans ou de l'arrêter.
Art. L. 718‑6‑1. – Les établissements publics
d’enseignement supérieur participant à un regroupement prévu au 2° de l’article
L. 718‑3 [COMUE ou Association] peuvent demander, par délibération de leur
conseil d’administration ou de l’organe en tenant lieu prise à la majorité
absolue des membres en exercice, leur fusion au sein d’un nouvel établissement
public à caractère scientifique, culturel et professionnel. Un décret en
Conseil d’État fixe les règles particulières d’organisation et de
fonctionnement de cet établissement dans le respect des principes d’autonomie
et de démocratie définis par le présent titre.
« Les établissements issus de la fusion
peuvent déroger aux dispositions des articles L. 711‑1, L. 711‑4, L. 711‑5, L. 711‑7, L. 711‑8, L. 714‑2, L. 719‑1, L. 719‑2 à L. 719‑5, L. 719‑7 à L. 719‑9 en fonction des
caractéristiques propres à chacun d’eux.
« Les dispositions du 4° de l’article L.
712‑2 et des articles L. 712‑6‑2, L. 811‑5, L. 811‑6, L. 952‑7 à L. 952‑9 sont applicables aux établissements
mentionnés au présent article, sous réserve des dérogations fixées par le
décret en Conseil d’État prévu au premier alinéa.
« Ce décret peut prévoir la création d’un
conseil académique disposant de tout ou partie des compétences prévues aux
articles L. 712‑6‑1 et L. 712‑6‑2. Lorsqu’un conseil académique n’a pas été
créé, les compétences mentionnées aux articles L. 712‑6‑1, L. 712‑6‑2, L. 811‑5, L. 811‑6 et L. 952‑6 à L. 952‑9 sont exercées
par les instances de l’établissement prévues par ce décret.
« Ce décret peut prévoir que les
établissements publics d’enseignement supérieur mentionnés au premier alinéa
qui ont demandé la fusion conservent leur personnalité morale lorsqu’ils
deviennent une composante du nouvel établissement public, pour une durée qui ne
peut excéder cinq ans, éventuellement renouvelable une fois. Il fixe également
les règles d’organisation et de fonctionnement de chacune de ces composantes et
détermine les relations entre ces composantes et l’établissement dont elles
font partie »
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