Comme Nicolas Sarkozy en son temps pour la LRU1,
François Hollande a profité de l'été pour promulguer, le 23 juillet, la LRU2 de Mme Fioraso.
Et les ennuis commencent car cette loi clientéliste et sans ambition, bâclée et votée dans l'urgence, à une faible majorité, est très mal rédigée. Elle passera d'ailleurs peut-être à la postérité en offrant aux professeurs de droit de nouveaux exemples pour
illustrer leurs cours sur la qualité de la loi, les dispositions légales
absurdes, ou, inapplicables.
Il nous faudra plusieurs chroniques pour dresser l'inventaire de ces malfaçons et nous ne prendrons que deux exemples aujourd'hui, le "droit de veto" du président qui, contre toute attente, figure encore dans la loi, et la Prime d'encadrement doctoral (PEDR) elle aussi bien vaillante alors qu'elle n'est plus versée depuis... 2009!
Parce que le sujet est bien plus complexe il nous faudra encore quelques jours pour mettre en ligne une deuxième chronique sur la nouvelle procédure de
constitution des comités de sélection. Elle s'annonce comme un nid à contentieux pour les établissements tant le gouvernement a fait preuve de maladresse, pour ne pas dire d'incompétence.
1° Une loi qui mentionne encore le « droit de
veto » du président
L’erreur commise par le gouvernement est un classique
du genre qui s'étudie en première année de licence.
Le « droit de veto » du président sur la
nomination des enseignants-chercheurs a été introduit par la LRU1. Loin de
supprimer cette prérogative très critiquée, la LRU2 de Mme Fioraso la conserve, mais elle transfère ce droit au conseil d’administration réuni en
formation restreinte aux enseignants-chercheurs.
Avant l’entrée en vigueur de la loi Fioraso le
« droit de veto » résultait de l’articulation de deux textes, l’article
L.712-2 du code de l’éducation qui autorisait le président à rendre un avis
défavorable à la nomination d’un enseignant-chercheur, et l’article L.952-6-1
du même code qui interdisait au conseil d’administration de transmettre la
liste des candidats au ministre en cas d’avis défavorable motivé du président.
La loi Fioraso supprime bien la référence au droit
de veto dans l’article L.712-2, elle crée bien une nouvelle possibilité d’avis
défavorable pour le conseil d’administration dans l'article L.712-3… mais elle oublie de modifier en
conséquence l’article L.952-6-1 qui prévoit toujours que le conseil académique
transmet la liste des candidats au ministre «sous réserve de l’absence
d’avis défavorable du président tel que prévu à l’article L712-2».
Voici donc une décision du nouveau « conseil
académique » suspendue à un pouvoir qui n’existe plus et qui ne tient pas
compte d’un pouvoir nouveau qui existe bien ! Cela ne fait pas très sérieux.
Bien entendu, les députés, distraits, n’ont rien vu
et les sénateurs, pas plus attentifs, ont également voté le texte du gouvernement sans sourciller.
Les votes en première lecture ayant fait l’objet de scrutins publics, vous
pouvez consulter la liste des parlementaires qui ont approuvé cette
bêtise, à l’Assemblée Nationale comme au Sénat et voir avec quelle attention vos
représentants exercent leur mandat.
2° Le maintien de la Prime d’encadrement doctoral
et de recherche
Est-ce à la paresse des conseillers de la ministre
qu’il faut attribuer le choix, curieux, de conserver dans la loi la prime
d’encadrement doctoral (PEDR) au lieu de faire apparaître la prime d’excellence
scientifique ?
On se souvient qu’en 2009, Valérie Pécresse avait
décidé, pour être dans l’air du temps, de transformer la PEDR en prime
« d’excellence scientifique » (PES). Elle s’était alors heurtée à un
problème de taille : pour modifier la prime il fallait une loi puisque la
PEDR figurait dans la partie législative du code de l’éducation. L’article L.954-2, al. 2 disposait en
effet : « La prime
d'encadrement doctoral et de recherche est accordée après avis du conseil
scientifique ».
Pour ne pas s’embarrasser avec le débat
démocratique la ministre avait eu recours à un subterfuge en faisant prendre le
décret n°2009-851 du 8 juillet 2009 ainsi rédigé : « Une prime d'excellence scientifique, qui est
la prime d'encadrement doctoral et de recherche prévue par l'article L. 954-2
du code de l'éducation, est attribuée par les établissements publics
d'enseignement supérieur et de recherche ».
On aurait pu au moins espérer du gouvernement qu’il
profite de la LRU2 pour mettre un peu d’ordre dans tout cela, soit en
supprimant la PEDR dans la loi, soit en supprimant la PES par décret ; il
n’en est rien. La LRU2 continue à mentionner la PEDR qui n'est plus attribuée depuis 2009 et
dispose : « La prime
d'encadrement doctoral et de recherche est accordée après avis de la commission
de la recherche du conseil académique ».
La PES reste donc cette prime
un peu honteuse, cachée dans l’ombre d’une indemnité plus légitime comme une
relation adultère que tout le monde connaît, mais dont personne ne parle pour
sauver les apparences.
Mais tout cela est peu de chose si on le compare aux problèmes soulevés par la nouvelle procédure de recrutement des enseignants-chercheurs. Je promets aux lecteurs de ce blog une chronique sur le sujet dans les jours qui viennent.
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