Mise à jour : Les "réorientés" dans un même "cycle" devraient bénéficier du maintien du tarif normal
L’annonce par le premier ministre de l’augmentation massive des frais d’inscription pour les étudiants étrangers non communautaires soulève de nombreux problèmes. Faute de temps, cette chronique ne reprendra pas les débats que nous avons eu sur les réseaux sociaux à propos de l’absurdité stratégique de cette mesure, de la réalité des coûts de formation dans les universités (les étudiants étrangers paieront bien plus qu’1/3 des coûts de formation) ou des intérêts qui dictent la mesure (difficile de croire au hasard quand sur les 4 exemples de campus délocalisés cités par le 1er ministre, un seul concerne une université, la Sorbonne avec Abou Dhabi). Je ne reviendrai pas non plus sur la mise sous tutelle des universités dans leur politique internationale : le Ministère des Affaires Étrangères renforce sa mainmise sur le SUP international. Vous pourrez retrouver dans cette chronique de janvier 2017 une partie de l'analyse, toujours d'actualité. Nous insisterons ici sur une conséquence qui n’a pas été évoquée à ma connaissance : le retour du contrôle policier des étrangers par les universités.
L’annonce par le premier ministre de l’augmentation massive des frais d’inscription pour les étudiants étrangers non communautaires soulève de nombreux problèmes. Faute de temps, cette chronique ne reprendra pas les débats que nous avons eu sur les réseaux sociaux à propos de l’absurdité stratégique de cette mesure, de la réalité des coûts de formation dans les universités (les étudiants étrangers paieront bien plus qu’1/3 des coûts de formation) ou des intérêts qui dictent la mesure (difficile de croire au hasard quand sur les 4 exemples de campus délocalisés cités par le 1er ministre, un seul concerne une université, la Sorbonne avec Abou Dhabi). Je ne reviendrai pas non plus sur la mise sous tutelle des universités dans leur politique internationale : le Ministère des Affaires Étrangères renforce sa mainmise sur le SUP international. Vous pourrez retrouver dans cette chronique de janvier 2017 une partie de l'analyse, toujours d'actualité. Nous insisterons ici sur une conséquence qui n’a pas été évoquée à ma connaissance : le retour du contrôle policier des étrangers par les universités.
Pour
faire passer la mesure, le 1er ministre a beaucoup insisté sur les réformes
administratives destinées à faciliter la venue en France des étudiants
étrangers, dématérialisation des procédures de visa, titres de séjour pour les
diplômés de master retournés dans leur pays qui souhaiteraient créer une
entreprise ou chercher un travail en France, etc. Mais en pratique c’est
d’abord la réactivation d’un contrôle de police des étudiants étrangers par les
universités qui va s’imposer.
Le
système mis en place est d’une grande complexité. Il ne se contente pas de
trier les étudiants entre français/européens d’une part et étrangers hors UE
d’autre part, il fait également le tri parmi les étrangers hors UE, et pas seulement un tri économique.
D’abord les étudiants « en échange » ne seront pas concernés par la réforme. La formule employée par le 1er ministre ne dispense pas les programmes qui ne prévoient pas la réciprocité. Pour contourner l’obstacle les universités auront donc intérêt à prévoir systématiquement la réciproque, même si, au final, peu de candidats français ou européens participent au projet.
Ensuite
la mesure ne concernera pas les étudiants internationaux qui résident dans
l’Espace Économique Européen. Là encore
la formule du 1er ministre est ambiguë, mais deux catégories d’étudiants
seraient concernées. Les étudiants déjà inscrits dans un « cycle » de
formation devraient continuer à bénéficier des droits d’inscription au tarif
normal. C’était le minimum, permettre à ceux qui ont commencé une formation de
la terminer sans subir la réforme. Attention, les étudiants en réorientation ne devraient pas bénéficier du même avantage [MAJ : finalement si...], ils paieraient les droits majorés !
En septembre il faudra donc déterminer si l’étudiant arrive en L1, M1, ou
doctorat pour connaître le montant des droits à
payer.
Deuxième
catégorie d’étudiants dispensés : les étudiants étrangers hors UE qui
résident dans l’UE, c’est-à-dire les étudiants qui bénéficient d’un titre de
séjour. On retrouve notamment dans cette catégorie les conjoints étrangers de
français mariés depuis plus de 3 ans (1 an pour les tunisiens), les réfugiés,
les apatrides. Ce n’est pas par mansuétude mais par crainte d’être sanctionné
par le Conseil d’État que le gouvernement a prévu cette exonération. Dans un
arrêt du 26 juillet 1982 GISTI et SGEN-CFDT, le Conseil d’État avait considéré
que les étudiants étrangers résidant en France devaient être soumis aux mêmes
règles que les étudiants français.
À
cette occasion on mesure le recul des valeurs universitaires. À l’époque les
universités étaient solidaires du GISTI et de la Ligue des Droits de l’Homme
pour contester devant le juge la légalité des décisions du gouvernement
limitant le droit d’accès des étudiants étrangers. Aujourd’hui la CPU publie d’une
main tremblante un communiqué alambiqué sans oser dénoncer la décision du
gouvernement.
Pourtant
les universités sont parfaitement légitimes à s’opposer à cette mesure. Il faut
rappeler ici qu’après un long combat, la circulaire interministérielle du 15 octobre 2002 avait admis que les universités n’avaient pas à contrôler la
situation juridique des étudiants étrangers, obligation qui relevait des seules
préfectures. Le texte, fruit d’un subtil arbitrage, précise :
« Toute
demande d'inscription doit être examinée au fond et de manière circonstanciée,
la situation du demandeur devant toujours être prise en compte, nonobstant les conditions d'entrée en France.
Toutefois,
la production du visa de long séjour est une des conditions de recevabilité de
la demande de carte de séjour temporaire.
Un
étudiant entré en France avec un visa touristique et dont l'établissement a
accepté l'inscription prend donc le risque de se voir refuser une carte de
séjour et de se retrouver en situation irrégulière avant l'achèvement de son
cursus.
Je vous demande donc de bien vouloir
veiller à éviter ce type de déconvenue en attirant l'attention des étrangers
sollicitant une inscription dans votre établissement sur les conditions
d'entrée des étudiants sur le territoire français. ».
La
police des étrangers ne fait pas partie des missions des universités, elles
devaient informer, pas contrôler. Or avec la réforme, les universités n’auront
d’autre solution que de contrôler les titres des étudiants puisque le montant
des droits d’inscription dépend de leur statut : inscrit ou non
inscrit dans un cycle, résident ou non résident, etc.
Vous voulez dire : "Guéant, sors de ce corps !" ?
RépondreSupprimerSalutations.
L'angoisse du blogueur... et bien entendu c'est la faute la plus énorme que l'on ne voit pas...
SupprimerMerci !