mercredi 28 août 2013

LRU2 : les ennuis commencent


Comme Nicolas Sarkozy en son temps pour la LRU1, François Hollande a profité de l'été pour promulguerle 23 juillet, la LRU2 de Mme Fioraso.

Et les ennuis commencent car cette loi clientéliste et sans ambition, bâclée et votée dans l'urgence, à une faible majorité, est très mal rédigée. Elle passera d'ailleurs peut-être à la postérité en offrant aux professeurs de droit de nouveaux exemples pour illustrer leurs cours sur la qualité de la loi, les dispositions légales absurdes, ou, inapplicables.

Il nous faudra plusieurs chroniques pour dresser l'inventaire de ces malfaçons et nous ne prendrons que deux exemples aujourd'hui, le "droit de veto" du président qui, contre toute attente, figure encore dans la loi, et la Prime d'encadrement doctoral (PEDR) elle aussi bien vaillante alors qu'elle n'est plus versée depuis... 2009!

Parce que le sujet est bien plus complexe il nous faudra encore quelques jours pour mettre en ligne une deuxième chronique sur la nouvelle procédure de constitution des comités de sélection. Elle s'annonce comme un nid à contentieux pour les établissements tant le gouvernement a fait preuve de maladresse, pour ne pas dire d'incompétence.

1° Une loi qui mentionne encore le « droit de veto » du président

L’erreur commise par le gouvernement est un classique du genre qui s'étudie en première année de licence.

Le « droit de veto » du président sur la nomination des enseignants-chercheurs a été introduit par la LRU1. Loin de supprimer cette prérogative très critiquée, la LRU2 de Mme Fioraso la conserve, mais elle transfère ce droit au conseil d’administration réuni en formation restreinte aux enseignants-chercheurs.

Avant l’entrée en vigueur de la loi Fioraso le « droit de veto » résultait de l’articulation de deux textes, l’article L.712-2 du code de l’éducation qui autorisait le président à rendre un avis défavorable à la nomination d’un enseignant-chercheur, et l’article L.952-6-1 du même code qui interdisait au conseil d’administration de transmettre la liste des candidats au ministre en cas d’avis défavorable motivé du président.

La loi Fioraso supprime bien la référence au droit de veto dans l’article L.712-2, elle crée bien une nouvelle possibilité d’avis défavorable pour le conseil d’administration dans l'article L.712-3… mais elle oublie de modifier en conséquence l’article L.952-6-1 qui prévoit toujours que le conseil académique transmet la liste des candidats au ministre «sous réserve de l’absence d’avis défavorable du président tel que prévu à l’article L712-2».

Voici donc une décision du nouveau « conseil académique » suspendue à un pouvoir qui n’existe plus et qui ne tient pas compte d’un pouvoir nouveau qui existe bien ! Cela ne fait pas très sérieux.

Bien entendu, les députés, distraits, n’ont rien vu et les sénateurs, pas plus attentifs, ont également voté le texte du gouvernement sans sourciller. Les votes en première lecture ayant fait l’objet de scrutins publics, vous pouvez consulter la liste des parlementaires qui ont approuvé cette bêtise, à l’Assemblée Nationale comme au Sénat et voir avec quelle attention vos représentants exercent leur mandat.

2° Le maintien de la Prime d’encadrement doctoral et de recherche

Est-ce à la paresse des conseillers de la ministre qu’il faut attribuer le choix, curieux, de conserver dans la loi la prime d’encadrement doctoral (PEDR) au lieu de faire apparaître la prime d’excellence scientifique ?

On se souvient qu’en 2009, Valérie Pécresse avait décidé, pour être dans l’air du temps, de transformer la PEDR en prime « d’excellence scientifique » (PES). Elle s’était alors heurtée à un problème de taille : pour modifier la prime il fallait une loi puisque la PEDR figurait dans la partie législative du  code de l’éducation. L’article L.954-2, al. 2 disposait en effet : « La prime d'encadrement doctoral et de recherche est accordée après avis du conseil scientifique ».

Pour ne pas s’embarrasser avec le débat démocratique la ministre avait eu recours à un subterfuge en faisant prendre le décret n°2009-851 du 8 juillet 2009 ainsi rédigé : « Une prime d'excellence scientifique, qui est la prime d'encadrement doctoral et de recherche prévue par l'article L. 954-2 du code de l'éducation, est attribuée par les établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche ».

On aurait pu au moins espérer du gouvernement qu’il profite de la LRU2 pour mettre un peu d’ordre dans tout cela, soit en supprimant la PEDR dans la loi, soit en supprimant la PES par décret ; il n’en est rien. La LRU2 continue à mentionner la PEDR qui n'est plus attribuée depuis 2009 et dispose : « La prime d'encadrement doctoral et de recherche est accordée après avis de la commission de la recherche du conseil académique ».

La PES reste donc cette prime un peu honteuse, cachée dans l’ombre d’une indemnité plus légitime comme une relation adultère que tout le monde connaît, mais dont personne ne parle pour sauver les apparences.

Mais tout cela est peu de chose si on le compare aux problèmes soulevés par la nouvelle procédure de recrutement des enseignants-chercheurs. Je promets aux lecteurs de ce blog une chronique sur le sujet dans les jours qui viennent.

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