L’AEF annonce que M. Frédéric
Guin devrait être promu aujourd'hui en conseil des ministres secrétaire général du
ministère de l’éducation nationale et du ministère de l’enseignement supérieur.
Il n’est pas certain que l’on doive s’en féliciter.
Enarque, l’homme est compétent
et, ce qui n’est pas si fréquent, courtois avec ses interlocuteurs. Mais
Frédéric Guin, nommé par Nicolas Sarkozy au poste de directeur des affaires
financières des deux ministères le 1er octobre 2009 est celui qui a
mis en œuvre le système destiné à réduire les moyens des universités à
l’occasion de leur passage aux RCE (responsabilités et compétences élargies).
Sous sa direction, les charges qui pesaient sur les universités ont été
volontairement sous-estimées pour limiter le transfert des crédits sur lequel l’État s’était engagé.
Dans un courrier de novembre 2011 qu’il avait co-signé avec Patrick Hetzel, ancien directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche et aujourd’hui député UMP, membre de la commission des affaires culturelles et de l'éducation à l’assemblée nationale, il reconnaissait à demi-mot, avec le ton de celui qui est toujours certain d’avoir raison, que le système était conçu pour être défavorable aux universités. C’est ce qu’ils appelaient, avec Patrick Hetzel, une « approche volontairement prudente ». Ils écrivaient : « L’expérience [des premiers années de passage aux RCE] montre que cette approche volontairement prudente garantit la situation la plus favorable pour le conseil d’administration de printemps, dans la mesure où aucun établissement n’est en situation de devoir réviser à la baisse la part masse salariale de sa subvention pour charges de service public et les ouvertures de crédits correspondantes ». Toujours perdantes, les universités ne risquaient pas, en effet, d’avoir à rendre les crédits qu'elles n'avaient pas reçus! Et en plus les conseils d’administration auraient dû remercier M. Guin et M. Hetzel de cette sous-estimation assumée de la masse salariale transférée par l’État !
En faisant l’inventaire des
universités en proie à des difficultés financières à cause de cette « approche volontairement prudente »,
on ne se félicite pas de l’action de la Direction des affaires financières et
de son directeur.
Les universités et le service
public de l’enseignement supérieur ont été les victimes de cette «prudence», mais l’État et la
République n’en sont pas sortis grandis non plus. Non seulement M. Guin et
Hetzel ont conçu un système destiné à sous-estimer la masse salariale des
universités, mais ils ont obligé les établissements passant aux RCE à présenter
des budgets qui étaient faux, insincères pour ne pas reconnaître cette
sous-estimation.
Il faut peut-être rappeler ici à
ceux qui ne sont pas spécialistes des questions budgétaires, qu’un budget est
une prévision construite sur la base des connaissances raisonnables que l’on
peut avoir de ses recettes et de ses dépenses. Or les universités savaient, du
moins certaines, que les charges qu’elles auraient à assumer étaient bien
supérieures à celles que la Direction des affaires financières avait calculées.
Nous avions donc posé la question
de la sincérité de notre budget au ministère. Devions nous présenter un budget
basé sur notre estimation, sincère, du montant réel des charges, ou fallait-il
s’en tenir au calcul sciemment sous-estimé par la DAF ? Bien évidemment,
laisser l’université afficher la réalité de ses charges salariales c’était
reconnaître que le calcul fait par le ministère était minoré.
La réponse de M.
Guin et de M. Heztel était très claire : « Il est demandé à chacun des établissements accédant aux compétences
élargies de construire son projet de budget primitif en prenant en compte
s’agissant de la part masse salariale de la subvention de l’État, la prévision
de dotation initiale relevant précédemment de l’État (ex titre 2) lui ayant été
communiquée… ». Il
fallait donc présenter un budget initial mensonger pour sauver les apparences
des promesses présidentielles.
La cour des comptes aura de quoi gloser sur ces
méthodes, ses conséquences sur la sincérité des comptes publics et
l’information du Parlement. En attendant est-il vraiment pertinent de
promouvoir ce genre de talents ?
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