dimanche 25 janvier 2015

Fonds de roulement des universités: le nouvel écran de fumée du président de la CPU ?

Mais quelle mouche a bien pu piquer le président de la CPU?

Depuis quelques jours, le voici qui multiplie les déclarations avec ses vice-présidents, notamment Gérard Blanchard, président de l'université de La Rochelle, et le président de la très influente CDEFI ( "Conférence des Directeurs des Écoles Françaises d'Ingénieurs") pour s'inquiéter, et même qualifier "d'inepte", un éventuel prélèvement sur les fonds de roulement des universités et écoles d'ingénieurs en 2015. Pour une fois que l'on pouvait considérer que le ministère prenait une décision raisonnable face à la crise que connaissent les universités, Jean-Loup Salzmann crie au loup.

Selon l'AEF, qui a interrogé les différents acteurs sur le sujet, il s'agirait de moduler la dotation des universités et des écoles lorsque leurs "réserves" dépassent 120 jours de dépenses de l'établissement. En clair, au lieu de répartir uniformément la baisse des crédits 2015 sur toutes les universités et toutes les écoles, celles dont les "réserves" sont excessives recevraient une dotation beaucoup plus faible, ce qui permettrait de ne pas réduire d'autant la dotation des établissements en difficulté.

Certes, la mesure est conjoncturelle, mais de là à la qualifier "d'inepte" quand on s'est dit "soulagé" par les coupes budgétaires dans la loi de Finances pour 2015, il y a de la marge! La prise en compte des fonds de roulement excessifs a le mérite de limiter les effets délétères des suppressions de crédits votées par le Parlement et elle ne concerne presque pas les universités! En 2013, seules 2 universités sur 77 avaient un fonds de roulement supérieur à 120 jours, près de la moitié étaient à peine à 30 jours de fonds de roulement et 6 étaient en dessous du seuil réglementaire de 15 jours (dont l'université présidée par Jean-Loup Salzmann).

Bref, et c'est là que l'on ne comprend pas le président de la CPU et ses amis, non seulement les universités ne sont quasiment pas concernées par la mesure, mais elles vont en tirer avantage puisque leur dotation sera un peu moins réduite! Et il y a même une certaine équité dans cette mesure.

mercredi 21 janvier 2015

Ensemble, les sénateurs socialistes et UMP votent la régionalisation de l’enseignement supérieur et de la recherche

Mise à jour 21 février 2015 : l'Assemblée Nationale a supprimé vendredi l'amendement contesté. Les Régions n'approuveront pas la carte des formations supérieures et de la recherche.
Prochaine étape, la commission mixte paritaire.


Pendant que François Hollande s’occupait de distraire la galerie en présentant des vœux pleins de belles paroles au monde éducatif, un sénateur socialiste, M. Vandierendonck, et un sénateur UMP, M. Hyest, faisaient de conserve voter par amendement, en toute discrétion, la régionalisation des formations de l’enseignement supérieur. Désormais, comme l’indiquent les deux sénateurs co-auteurs de l’amendement, « la région [aura] un rôle d’approbation de la carte des formations supérieures et de la recherche ».

Les régions pourront donc s’opposer à l’ouverture ou au maintien d’une formation ou bien encore, elles pourront confier telle formation à tel établissement, public ou privé, plutôt qu’à tel autre. Cette décision me scandalise pour trois raisons.


D’abord la méthode. Depuis l’élection de François Hollande, c’est dans la confusion et l’opacité que se joue l’avenir de l’enseignement supérieur et de la recherche en France. Après avoir voté une LRU2 truffée d’erreurs (cf mes précédentes chroniques ici, et ), avoir transformé les COMUEs dans une loi consacrée à l’agriculture, c’est une nouvelle fois par voie d’amendement à une loi « relative à la Nouvelle Organisation territoriale de la République » que l’on modifie sur un point fondamental l’enseignement supérieur en France, sans consultation, sans débat, sans évaluation. Le mépris est immense, l’intrigue détestable.

lundi 12 janvier 2015

Le jour où la France se souvint des SHS


La France vient de vivre un drame abominable. Des hommes et des femmes ont été tués pour ce qu’ils étaient, des caricaturistes, des journalistes, des libertaires, des juifs, des policiers. De simples citoyens aussi ont été les victimes de cette violence qui était tout sauf aveugle.

Qu’avons nous vu ensuite ? Une mobilisation populaire sans précédent pour exprimer une solidarité, l'attachement à la Liberté d'expression, un sentiment de révolte devant tant d'horreur. Mais on a vu aussi un besoin d’explication, de compréhension de ce drame. Partout, dans la presse ou sur les réseaux sociaux, on s’est interrogé.

Alors, on a questionné les sociologues, consulté les criminologues, sérieux ou auto-proclamés d'ailleurs, écouté les juristes. On interpelle les artistes, peintres dessinateurs, écrivains pour qu'ils mettent des mots, des images sur nos émotions. On sollicite l’avis des psychologues, des historiens, on recueille le point de vue des spécialistes des religions, de la géopolitique, bref… on redécouvre l’immense nécessité de la recherche en Sciences Humaines et Sociales.

Ce soir, sur les réseaux sociaux, la ministre de l'Éducation, la secrétaire d’État à l'Enseignement Supérieur et à la Recherche et le président de la CPU appellent à une « mobilisation du sup pour les valeurs de la République » ou à une « grande mobilisation de l’école et de l’enseignement supérieur pour les valeurs de la République ».


Peut-être même sont-ils sincères tous ces élus, mais vous m’excuserez d’en douter. Najat Vallaud-Belkacem comme avant elle Geneviève Fioraso, Laurent Wauquiez ou Valérie Pécresse ont foulé aux pieds et méprisé les sciences humaines et sociales qui sont au cœur de la réflexion sur les valeurs de la République.

samedi 3 janvier 2015

Bonne Année?!




"L’honneur est ce bien moral conquis dans la lutte
et qui permet à la fois d’acquérir la considération d’autrui
et de conserver sa propre estime." 


Geneviève Fioraso vient de présenter ses voeux pour l'année 2015 sous la forme d'une carte sur Twitter et d'une animation Flash® sur le site du ministère.

Si Najat Vallaud Belkacem a pris soin de dédier les siens "à tous les personnels du ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, aux élèves et étudiants, aux parents d'élèves et aux collectivités", Mme Fioraso ne s'est pas donnée cette peine. Pas un mot pour les personnels ou pour les étudiants, Mme Fioraso présente ses voeux à la cantonade!

La carte de voeux elle-même est révélatrice des centres d'intérêts, ou plutôt du désintérêt manifeste de Mme Fioraso pour certaines disciplines et certains acteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Pas une image d'étudiant, pas une image d'université, pas une image illustrant les Sciences Humaines et sociales. Cette carte de voeux est à l'image de la politique clientéliste de Mme Fioraso.

Ô bien entendu, il y a Rosetta, une scène chirurgicale - que l'on imagine être celle du coeur Carmat - et une voiturette qui ressemble à celles que fabriquait Heuliez, si chère à l'ancienne présidente de la région Poitou-Charentes, avant sa fermeture en 2013... Et puis il y a le nucléaire, l'agro-alimentaire, les nano-technologies, les transports... bref tous ces lobbies que Geneviève Fioraso soutient avec constance depuis bientôt trois ans et qui, il est vrai, le lui rendent bien. Des voeux à la cantonade donc, mais des voeux entre amis, entre copains.

On pourra se consoler en se disant que tout cela n'a pas du coûter bien cher. La composition est vieillotte, pas "innovante" pour deux sous, et les images ont l'air piquées un peu au hasard dans les pages "actualités" du site du ministère ou sur Internet, ici pour l'image de Rosetta, pour le grand collisionneur du CERN . Ça fait cheap et bâclé entre la lecture de deux vidéos sur Youtube.

Et puis il y a cette phrase d'Hubert Curien. Je la trouve terriblement creuse, mais bon! La phrase se trouve gravée sur les murs d'une salle au Ministère de la recherche et elle était sur la page de garde de la plaquette d'hommage que Geneviève Fioraso a préfacé en septembre 2012! Pas compliquée à retrouver donc. "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme"...

Anecdote me direz-vous? Pas tant que ça. C'est comme "l'affaire Piketty"et cette Légion d'honneur que Mme Fioraso propose d'autorité, sans se soucier de l'avis de l'intéressé. Ceux qui connaissent le processus conduisant à l'attribution d'une distinction honorifique savent que l'on se renseigne sur l'état d'esprit du futur bénéficiaire! J'ai un grand respect pour ces distinctions qui constituent, de mon point de vue, une des rares façon d'exprimer la reconnaissance de la Nation, mais je comprends aussi qu'une personne ne souhaite pas être ainsi distinguée. Si l'on veut rendre hommage à quelqu'un, la moindre de chose est de s'assurer avant que cet hommage sera bien reçu comme tel par le bénéficiaire. Mais non ; Geneviève Fioraso n'en a cure et offre à Stéphane Le Foll l'occasion de dire une nouvelle fois tout le mépris qu'il a pour les chercheurs : ""qui a des idées intéressantes mais qui est chercheur, qui est dans son bureau, qui fait des calculs, qui a comme responsabilité une démarche intellectuelle et puis la politique qui est confrontée à la réalité" (résumé ici)

Après une année 2012 où Geneviève Fioraso avait exprimé son mépris pour les universités, une année 2013 où la même ministre avait fait la démonstration de son incompétence avec le vote de la LRU2, une année 2014 absolument catastrophique qui se solde par 1 milliard d'euros de crédits supprimés dans l'enseignement supérieur et la recherche, un clientélisme forcené et une incompétence jamais démentie, 2015 commence en Fanfare!

Je vous souhaite à toutes et à tous... beaucoup de courage ; il en faudra.